MAGAZINE ELLE 
Mai 2009
 


Marion Cotillard, la divine

La superstar de la Croisette, c’est elle ! Tout réussit à Marion Cotillard : Hollywood se l’arrache, elle est amoureuse et Dior l’a consacrée égérie. Elle s’est livrée à Edouard Dutour. Timide et surexposée, belle mais pas tapageuse, parisienne et adoptée par Hollywood, souriante et fragile, étrangère à la mode et nouvelle icône Dior, intelligente mais pas verbeuse, fidèle à un acteur et amoureuse des autres si c’est du cinéma… Le paradoxe fait une escale en France, entre deux long-courriers, entre deux longs métrages, avec sa gloire en bandoulière. Et son Lady Dior, le sac dont elle est l’égérie, pour seul bagage à main. L’occasion de retrouver le fameux Olivier Dahan, réalisateur d’une « campagne cinématique » comme du Hitchcock : « Depuis “La Môme”, il y a entre nous une histoire très intense. On parle peu, on fonctionne presque comme par télépathie. Pendant le tournage de “The Lady Noire Affair”, on a retrouvé cette évidence. Et c’est pas mal, un peu de simplicité, entre deux êtres compliqués ! » s’amuse Marion, qui, en ce mois de mai, se porte comme un charme.

Sa vie depuis l'Oscar
Il faut dire qu’elle nous revient, deux ans après l’oscar, avec un véritable festival à son générique personnel : un polar avec Johnny Depp (« Public Enemies », de Michael Mann), une comédie musicale aux côtés de Daniel Day- Lewis, Penélope Cruz et Nicole Kidman (« Nine », de Rob Marshall), et une grande histoire d’amour avec Guillaume Canet (« Le Dernier Vol », de Karim Dridi). Trois films dans la boîte qui laissent à penser que la prouesse de Marion Cotillard, c’est aussi d’avoir réussi sa vie après le sacre. Ou comment rester debout quand l’existence bascule… D’ailleurs, en plein « chaos Cannes », l’actrice – qui reconnaît avoir vécu des périodes moins apaisées – fait montre d’un calme olympien : « J’ai grandi, j’ai changé. Ce qui m’arrive me rend profondément heureuse. Et j’ai envie d’en profiter ! A 20 ans, j’aurais moins supporté, moins “su porter”, tout ça. Le désir d’exercer mon métier dans la sérénité a eu le temps de s’épanouir, presque de s’impatienter. Alors, aujourd’hui, j’accueille les choses avec une grande gaieté. » Et plus question de bouder son plaisir : cet été, faisant fi des curieux, elle passera devant la caméra de Guillaume, son conquérant, qui réalise un film de bande, intitulé « Les Petits Mouchoirs ». « Il m’a imaginée dans la peau d’une fille à vif, pas vraiment la plus stable du monde, mais qui essaie de trouver sa place. Et ça me plaît beaucoup ! » lance-t-elle avec une malice qui en dit long sur leurs « Jeux d’enfants ».

Sa rencontre avec Johnny Depp
Revenons aux questions existentielles : il est comment Johnny Depp, avec lequel elle forme un couple lumineux dans le très noir et formidable « Public Enemies »* ? « J’ai décroché ce rôle avant l’oscar. Je n’avais jamais rencontré Johnny. La première fois, c’était dans le bureau de Michael Mann, à Los Angeles. Il est exactement comme on l’imagine : un gentleman à l’ancienne, avec une classe cultivée de manière honnête, et une élégance qui va bien plus loin que l’acception vestimentaire. » Avec l’acteur le mieux payé au monde, Marion n’a communiqué qu’en anglais, pour rester dans le bain américain, excepté pendant la fête de fin de tournage, où elle s’autorisa à lui parler dans la langue maternelle de ses enfants. * Sortie en salles le 8 juillet.

Une bosseuse invétérée
Voilà le secret Cotillard : au fond, elle est sérieuse, professionnelle, comme on dit outre-Atlantique. Une bosseuse invétérée, du genre à mettre toutes ses forces au service d’une fiction. Pour en faire une réalité. Ainsi, dès le lendemain des Oscars, elle a entamé la préparation de « Public Enemies » : « Je me suis plongée dans l’histoire des Etats-Unis, le Chicago des années 30, la création du FBI… Michael Mann m’a fait rencontrer des prostituées qui m’ont expliqué comment repérer une “bonne proie”, mais aussi des femmes de prisonniers racontant l’attente d’un homme incarcéré. » Cette détermination, cette passion pour le cinéma, Marion l’a aussi déployée dans « Nine », l’adaptation d’un show de Broadway, lui-même inspiré de « 8 1/2 », où elle chante et danse, reprenant le rôle de Luisa, interprété par Anouk Aimée dans le chef-d’œuvre de Fellini. Difficile de faire plus chic ? Eh bien si ! La nouvelle vient de tomber : en septembre, notre Môme nationale sera l’épouse de Leonardo DiCaprio (« Inception », de Christopher Nolan) ! « Léo, je l’ai déjà rencontré plusieurs fois, en privé, grâce à Guillaume… Mais surtout je suis fan de l’acteur, j’ai vu tous ses films. C’est dire combien je suis heureuse de lui donner la réplique ! » Lui aussi devrait apprécier…

Fidèle au cinéma français
Marion a donc réussi l’ascension de la colline de Hollywood. Pourtant, elle ne voit pas sa vie – ni ses nuits – devenir américaine : « Je n’ai pas acheté de maison à L.A. Peutêtre, un jour, un pied-à-terre sur la côte Est, plus proche de la France, car ma base, c’est ici ! » Mais sans doute est-elle déjà trop loin, trop chère, trop star, pour le cinéma hexagonal ? « Absolument pas ! J’étudie avec beaucoup d’attention les propositions des réalisateurs français. Regardez, cette année, j’ai fait un film français… avec Guillaume Canet, et je vais faire le film français… de Guillaume Canet ! » Que voulez-vous, cette fille a toujours respiré avec le coeur et, vu le résultat, il serait malvenu de commenter ses affinités. Avant de la quitter, Festival oblige, on lui demande d’évoquer ses souvenirs de Croisette : « J’ai connu des moments de grande solitude, voire une forme d’humiliation, quand j’étais une toute jeune comédienne. Mais aussi des instants fabuleux, comme la projection des premières images de “La Môme”, début d’un buzz phénoménal. » Qui fera d’elle la seule actrice au monde à cumuler le bafta, le golden globe, l’oscar et le césar pour un même rôle. Définitivement, à Cannes comme ailleurs, sa place est tout en haut des marches. Ave Marion !