MAGAZINE ELLE  
FEvrier 2009
 


Depuis des années, l’actrice se bat pour la protection de l’environnement. Il était donc tout naturel qu’elle soit la rédactrice en chef de notre numéro vert. Avec énergie et passion, elle nous parle de son engagement et de son envie de faire bouger les choses. Sous l’objectif de Jean-Baptiste Mondino, elle célèbre la nature et son attachement à des valeurs authentiques.

D’où vient votre conscience écolo ?
Mes parents ont toujours été très concernés par ces questions. Mes grands-parents étaient maraîchers, en contact permanent avec la nature. Ils travaillaient à l’ancienne. C’était avant l’industrialisation à outrance... Au départ, le productivisme agricole partait d’une bonne intention, puisqu’il s’agissait de nourrir les hommes, mais on est allé trop loin. On est arrivé à une soif de profits qui a entraîné un gaspillage ahurissant. Le résultat, c’est un déséquilibre total entre les êtres humains et les arbres, les champs, les animaux...

Qu’est-ce qui vous rend particulièrement verte de rage ?
J’ai traîné une énorme colère en moi pendant des années ! Avant, je faisais partie des gens considérés comme un peu allumés, hippies, version maison dans le Larzac avec chèvres et peaux de mouton. Aujourd’hui, ça a changé. On entend enfin ce que les scientifiques ont à nous dire. Du coup, ma colère s’est adoucie. La prise de conscience actuelle me rassure et me rend un peu plus optimiste. Mais il ne suffit pas de savoir : maintenant, il faut passer à l’action. Il y a urgence !

Vous parlez d’optimisme, mais pour tous ceux qui, comme vous, se documentent sur la situation écologique, c’est plutôt anxiogène, non ?
On n’est pas obligés d’être catastrophistes et de se renseigner sur tout ! Par contre, on doit tous prendre conscience que la déforestation, la pollution des mers et le réchauffement climatique sont extrêmement graves.

On se sent tout petits face à ces changements en cours, non ?
On est tout petits, mais on est beaucoup ! On est six milliards, dont la moitié de citadins ! Notre action sur la Terre a modifié un équilibre fondamental : l’air. On est des fourmis, certes, mais dans une fourmilière, il y a des milliers de fourmis : quand l’une d’elles creuse un trou, ça ne change pas grand-chose, mais quand des milliers de fourmis creusent des trous partout, le sol ne tient plus ! Nous devons prendre nos responsabilités. On ne peut plus se dire que le réchauffement climatique n’est qu’un phénomène normal.

D’un point de vue écolo, vous trouvez que l’on vit de manière aberrante ?
Oui, au-delà du point de vue écologique ! On vit de manière aberrante tous ensemble sur cette planète, avec ce non-partage des richesses, ce déséquilibre qui entraîne, entre autres, le désastre écologique. On devrait préserver l’atmosphère comme on préserve la vie de son enfant, comme on a envie que les gens autour de nous vivent en bonne santé et longtemps ! Prenez les arbres : c’est ce qui nous permet de respirer ! Si on était logiques, on ferait tout pour les préserver. Pourtant, la déforestation s’aggrave.

C’est toute notre société de consommation qui est remise en question...
Oui, il faut un profond examen de conscience, qui passe aussi par les gouvernements, pour changer nos priorités. Dans les pays industrialisés, où l’on vit globalement bien, nous avons une vraie responsabilité face aux pays qui sont dans une situation catastrophique et n’ont pas les moyens de lutter, comme le Bangladesh.

Certains disent que le combat écologique est un privilège de nantis.
C’est vrai ! Puisqu’on a les moyens de vivre aussi confortablement, on a aussi les moyens de rééquilibrer les choses dans le bon sens. Consommer moins ne nous rendra pas malheureux ! Se servir moins de sa voiture, arrêter d’utiliser des lingettes ou faire moins de déchets ne nous rendra pas malheureux ! Ceux qui sont éduqués et vivent dans un pays développé doivent prendre la mesure de leurs responsabilités.

Vous parlez d’éducation, la vôtre allait-elle dans ce sens ?
J’ai reçu une éducation basée sur le respect. De soi, des autres, de l’endroit où l’on vit. Agir autrement est suicidaire. Si on s’enferme dans une pièce pleine de gaz carbonique, on meurt ! Il est donc extrêmement important de réapprendre à se connecter avec la nature, avec ce que l’on mange, ce que l’on boit, ce que l’on consomme. Dans les villes, c’est devenu totalement incohérent. On ne sait même plus en quelle saison il y a des fraises ou des pommes.

Ce n’est pas parce qu’on vit à la campagne qu’on a des comportements plus écolos ! Les paysans polluent les rivières et les nappes phréatiques...
Absolument. L’agriculture intensive est soumise à des impératifs de rendement totalement fous, mais on ne peut pas demander aux paysans de changer entièrement leur manière de fonctionner du jour au lendemain parce que leur survie en dépend. C’est là que les gouvernements ont de grandes choses à faire et c’est pour cela que Nicolas Hulot a été si important dans le Grenelle de l’environnement.

Pourtant, les choses avancent très lentement...
Avant de voir des résultats, il faudra encore beaucoup de temps. C’est pour ça qu’il est important d’agir dès maintenant. Il est plus facile de détruire que de construire. On peut raser en un jour l’équivalent de dizaines de terrains de football dans la forêt amazonienne, alors qu’il faut à un arbre des dizaines et des dizaines d’années pour devenir solide ! La protection de la forêt n’est pas une lubie, mais une question de survie pour l’homme. Plus on coupe d’arbres, plus le sol est vulnérable, d’où, selon les endroits, inondations ou désertification. Avec le réchauffement climatique, l’arbre devient le meilleur ami de l’homme... [Elle rit.] C’est peut-être con la manière dont je le dis, mais s’il n’y avait pas d’arbres, on ne respirerait pas, rien ne tiendrait debout !

C’est une des causes qui vous tient à coeur...
Oui, et il y a des initiatives rassurantes de reforestation, comme celle lancée par Tristan Lecomte, le fondateur d’Alter Eco, pour la forêt amazonienne : chacun rachète une parcelle et s’engage à reboiser. J’en ai une sur laquelle j’ai planté 150 arbres.

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